SPALACATE LE PORTE A CRISTO

Publié le par Roland JACQUES

"Ouvrez grandes les portes au Christ" criait avec conviction le nouveau pape en 1978 sur la place Saint Pierre. Aujourd'hui encore ce cri retentit dans mes oreilles alors que je n'avais que 10 ans lors de cette élection. J'étais encore dans l'orphelinat Saint Joseph qui m'a accueilli à la naissance. Les religieuses franciscaines étaient toutes devant le vieux poste de télévision pour ce moment historique et nous aussi, les orphelins devions y participer. Alors voici une centaine d'enfants silencieux sous peine d'un "shhhhht" de la Mère supérieure. Le silence était religieux si j'ose dire avec un petit mot d'humour.

Certains de mes frères d'infortune s'ennuyaient ferme et auraient largement préféré aller jouer au ballon au lieu d'être là, entassés dans cette salle télé. D'autres regardaient sans conviction et puis il y avait un petit bonhomme de 10 ans qui regardait avec une émotion inexplicable sous le regard bienveillant de sa mère d'adoption, Sr. Célestine. Ce petit bout, c'était moi.

Dès l'élection de ce pape hors du commun j'ai eu une affection extraordinaire pour lui. Étant orphelin de naissance, je n'ai pas connu de père ni de mère et j'ai choisi moi-même (le luxe de l'orphelin) mes parents. Ma mère, Sr. Célestine et mon père était l'aumônier de l'orphelinat, l'Abbé Fernand Reuter. Fernand disait toujours que le pape était son "père" alors si Fernand était mon père, alors Jean-Paul II était mon grand-père d'adoption. Des millions d'enfants auraient aimés avoir un grand-père comme celui-là !

Son premier discours résonne encore dans mon coeur, non pas parce qu'il est passé en boucle sur les chaines de télé récemment mais parce que le jour où il a été prononcé, je l'ai reçu dans mon coeur même si je ne comprenais pas tout. Il parlait différemment de l'autre pape que nous devions regarder à la télé avec les soeurs, Paul VI. J'étais trop petit pour comprendre ce qu'il disait et surtout je n'avais pas de lien affectif avec lui. Même son visage ne m'inspirait pas. Dans tous les coins de l'orphelinat, son portrait trônait. Mais ce nouveau pape criait avec conviction le Nom de Jésus. Il disait d'ouvrir les portes à Celui qui apporte l'Amour. 

Quand on est orphelin de naissance et qu'on vit dans un monastère depuis toujours, une maison entourée de grands murs et de barrières, la phrase "OUVREZ GRANDES LES PORTES AU CHRIST" a un sens assez important. Je sais déjà à l'époque que je voulais donner ma vie au Seigneur et je savais aussi que je voulais aller dire à tous ceux qui ne croient pas que Jésus est Seigneur. Pour cela il fallait que les portes de l'orphelinat s'ouvrent en grand pour que je puisse sortir.

Au fil des années, ces mots du BX. Jean-Paul II, ont été source de beaucoup de contradiction pour moi. Quand j'ai quitté l'Église et que je suis parti dans le monde de la drogue, cette phrase me revenait encore. Je souffrais de ma vie perdue mais je ne voulais pas ouvrir la porte de mon coeur au Christ parce que je savais qu'Il viendrait me sauver. J'ai refusé cet Amour gratuit. Puis quand j'ai finalement baissé ma garde un jour et que j'ai enfin accepté de regarder vers le Christ, mon petit miracle a eu lieu : j'ai retrouvé la vie, j'ai retrouvé la capacité de regarder aussi avec mon coeur. À la place de la souffrance est venue la paix. 

Eh bien aujourd'hui, je n'ai pas peur de dire que quand on OUVRE GRANDE LA PORTE AU CHRIST, Il fait des merveilles en nous. C'est cela le début d'un chemin de conversion. Il suffit de faire ce premier pas : OUVRIR SON COEUR AU SEIGNEUR et le reste se fait dans la douceur. Le Bienheureux pape nous a donné un chemin pour nous convertir : quitter nos peurs. En effet, n'a-t-il pas dit avant cette phrase : N'AYEZ PAS PEUR ? De quoi pouvons-nous avoir peur ? 

Quand je parle de Jésus et de conversion avec des jeunes non-croyants, ils me disent directement : "Ouais, et puis on sera prisonnier de ça". Ils ont en effet peur d'être OBLIGÉ de faire des choses qu'ils ne voudraient pas. Ils ont peur que Dieu les empêche de faire ce qu'ils veulent. C'est mal connaître le Seigneur.

In n'empêche rien, Il donne tout ce dont nous avons besoin et nous n'avons pas l'obligation de prendre ce qui est donné. Il nous donne à choisir entre la vie et la mort et c'est à nous de faire le bon choix. Dieu ne dit pas : TU DOIS mais JE DONNE ! B 16 le disait encore aux jeunes à Sydney : "Dieu ne prend rien, Il donne TOUT".

Dieu, révélé en Jésus-Christ n'est pas ce Dieu "règlement" que l'on pourrait parfois trouver dans l'Ancien Testament. Il est un Dieu Amour qui propose la vie en plénitude mais qui laisse le choix aux hommes de refuser ce don extraordinaire. L'Église des 17 premiers siècles n'avait pas vraiment compris cela et a maintenu les enfants de Dieu dans l'ignorance de l'Amour du Père et les a emprisonnés dans un carcan qui n'était pas celui de Dieu. Les papes, évêques et prêtres des premiers temps de l'Église et ce jusqu'à la fin du Moyen-Âge au moins, ont répété exactement les mêmes fautes que les pharisiens et les scribes de Palestine au temps de Jésus. On a brûlé des gens parce qu'ils refusaient le Christ !!! Est ce que le meurtre peut se justifier quand un homme choisit de ne pas croire ? On a torturé des gens soi-disant au Nom du Christ mais quelle est donc cette hérésie ? On a tué des frères qui croyaient en Jésus mais on les a massacrés quand même, femmes, enfants et vieillards confondus, simplement parce qu'ils étaient protestants. Est-ce justifié ? Ce n'est pas tant le Christ que l'Église de cette époque voulait défendre mais son pouvoir temporel. 

Quand j'ai étudié l'histoire de l'Église, ne n'ai pu que me réjouir bruyamment de la perte des terres du Vatican lors de l'accord de Latran. C'est ainsi que Jésus l'aurait voulu. L'histoire de notre Église montre que les hommes dans le passé ne cherchaient qu'honneurs et gloire non pas pour le Christ mais pour eux-mêmes. Cela est tombé et tant mieux. Il nous a fallu revenir à l'ÉVANGILE ! Je suis heureux que la tiare soit rangée dans un musée. Christ n'a jamais porté d'autre couronne que la couronne d'épines et voilà que ses vicaires se sont permis une TRIPLE couronne qui plus est ! Jésus s'asseyait sur des pierres ou par terre et ses vicaires se sont fait des trônes en OR ? Et puis quoi encore ?

Je dis bravo au courage de Jean XXIII qui a mis un coup de pied magistral dans toutes ces institutions rouillées et poussiéreuses. Bravo à Paul VI qui, au lendemain de son couronnement, a vendu sa tiare, sa couronne pontificale, pour donner le fruit de la vente aux pauvres. Bravo à Jean-Paul I qui est venu d'un sourire puissant illuminer le coeur des pauvres gens dont il était lui-aussi. Bravo à Jean-Paul II qui est allé embrasser les pauvres partout dans le monde, pleurer et rire avec eux, les écouter et leur parler.  

Il y a quelques jours, la messe a été célébrée sur la table de ma salle à manger. Est ce que Jésus était moins là que dans une cathédrale somptueuse ? Est-ce qu'Il aurait préféré un autel en marbre et des marches en or ? J'en doute. Ce que veut le Seigneur, c'est que nous ouvrions nos coeurs à Son Amour, à Sa Miséricorde, à Sa Puissance salvatrice comme le disait Jean-Paul II en ce jour d'automne 1978. Le pape, ce jour-là, n'a pas exhibé une couronne mais a tenue sa crosse en forme de croix vers les fidèles. Il leur a montré Jésus.

"Le sacrifie qui plaît à Dieu est un esprit brisé et broyé" dit le psaume 50 (51). Dieu ne veut pas notre liberté, nos bien, nos certitudes, NON, Il veut notre bonheur parfait, notre liberté de vivre debout en hommes forts. Il nous invite à ouvrir nos coeurs à Son Fils Jésus Christ qui vient nous libérer de tout ce qui nous empêche d'être heureux. 

C'est dans la simplicité, dans la pauvreté évangélique que nous pourrons contempler le visage du Christ, loin des honneurs dont les hommes s'accaparent. C'est en voulant ressembler au Christ que nous pourrons Le voir, Le rencontrer. Jésus n'a jamais demandé de place d'honneur, Il n'avait pas même une pierre pour poser Sa tête. C'est cela qu'il faut aller dire à ceux qui ne croient pas. Il faut leur dire que Jésus ne leur demande rien, il vient tout leur donner.

Un jour, je faisais le caté dans une maison particulière avec des enfants de familles défavorisées. Les gosses écoutaient et les parents qui se tenaient à l'écart tendaient une oreille distraite vers notre petit groupe tout en faisant ce qu'ils avaient à faire. À un moment, l'un des hommes qui était un peu à l'écart est venu s'asseoir dans le cercle des enfants et a écouté avec eux le programme du jour. C'est lui qui a conclu le caté de ce jour là avec une parole simple : "Jésus est mon ami parce qu'Il est exactement comme moi, C'EST UN PAUVRE !"

Je n'aurais pas mieux pu le dire. Voilà donc un homme qui ne sait pratiquement pas écrire et très peu lire, qui a la sagesse du coeur et qui a tout compris. JESUS EST COMME MOI, C'EST UN PAUVRE !

Alors, avec nos coeurs de pauvres, ouvrons grandes les portes à ce "Frère pauvre" qui vient nous enrichir de Sa Très Sainte Présence. MARANATHA dit-on en araméen : "VIENS SEIGNEUR"

Bonne et sainte journée à tous.


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